En ce moment je n'arrête pas de lire, ça doit être le pouvoir magique de ma liseuse chérie. Je suis ravie, puisque j'aime à croire que les livres me rendent meilleure. Ainsi, j'ai acheté une deuxième liseuse, d'une autre marque. Elle est arrivée la semaine dernière dans ma boîte aux lettres, préchargée d'une vingtaine de bouquins dont Alice in Wonderland en allemand, dans une traduction du XIXe siècle, ce qui m'a fait tilter parce que lire en allemand, c'est un peu mon nouveau kiff, ou ma nouvelle marotte.
Évidemment, je ne lis que de (très) bons livres. (Ça paraît arrogant. En fait, c'est juste que je crois avoir réussi, au fil des années, à affiner mon flair littéraire de façon à ne (presque) plus me tromper.) Le dernier en date, que j'ai fini aujourd'hui, est Sostiene Pereira (Pereira prétend) de l'écrivain italien Antonio Tabucchi. Je l'avais acheté il y a quelques semaines, après avoir lu un article de Mohsin Hamid sur ce bref roman cher à son cœur.
Je l'ai terminé tout à l'heure et puis je suis allée consulter la notice Wikipedia de Tabucchi, parce que j'avais envie d'en savoir un peu plus sur lui. J'ai alors appris qu'il est mort il y a un an. Je n'ai pas du tout l'impression d'en avoir entendu parler à ce moment-là ! Il avait 68 ans et est mort à Lisbonne, la ville où se déroule Pereira prétend. Dans la notice, le rédacteur explique que Tabucchi a choisi d'apprendre le portugais après avoir eu un choc esthétique en lisant Le bureau de tabac de Pessoa. J'adore ce genre d'histoire où une personne apprend une langue étrangère par passion littéraire, c'est si beau et si rare.
Juste avant, j'ai lu le dernier roman de mon idole littéraire Coetzee. Ça s'appelle The Childhood of Jesus. Voilà un titre programmatique qui laisse le lecteur dans un état d'hésitation particulièrement embêtant. Du style, l'enfant dans le livre, qui s'appelle David, est-il Jésus ? S'agit-il d'un récit allégorique ? D'une parabole ? Quel est ce lieu, à la fois étrange et banal, où vivent les personnages ? Pourquoi ont-ils des discussions philosophiques à longueur de pages ? Que penser de la scène où Simón débouche les toilettes de la mère de David (le texte laisse entendre que le tuyau d'évacuation a été bloqué par des protections périodiques) ? Et de cette autre scène, où Simón cherche à devenir membre d'un "centre de loisirs et de divertissement" qui propose des séances de "thérapie physique" ? Pourquoi le chien s'appelle-t-il Bolívar et le copain de David Fidel ? Faut-il y voir une allusion politique ? Beaucoup de choses déconcertantes et pas mal d'humour pince-sans-rire dans ce livre fascinant.
Coetzee habite dans la même ville que moi et j'espère le rencontrer un jour, ce qui est idiot car en fait je n'aurais rien à lui dire, à part "j'adore vos livres, sauf In the Heart of the Country", "votre enfance en Afrique du Sud, ça n'avait pas l'air très marrant" et "votre nom se prononce bien Coutte-zée ?" Malgré tout, j'aime à rêver que ce serait chouette d'aller boire un thé avec lui et de parler, peut-être, de Don Quichotte, de the pooness of poo et de bouquins. Si tout se passait bien, je pourrais même l'inviter à dîner et concocter un menu végétalien, bien sûr il y aurait aussi mon cher Paul et en partant je leur donnerais à chacun un pot de kasundi* de tomates. Le grand homme me tapoterait l'épaule benoîtement et repartirais, l'œil critique. Je serais enchantée. Il serait comme une sorte de père spirituel que j'admirerais infiniment.
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*le kasundi est un condiment épicé à base de tomates et de piments frais, d'origine bengalie. Tout est meilleur avec et je pourrais même, si ça vous intéresse, vous en donner la recette, ce qui serait une première ici.
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{Coetzee, JM, The Childhood of Jesus, Melbourne, The Text Publishing Company, 2013}
{Tabucchi, Antonio, Sostiene Pereira, Feltrinelli, 1994 -- Pereira prétend, traduit de l'italien par Bernard Comment, 1994}
Coetzee habite dans la même ville que moi et j'espère le rencontrer un jour, ce qui est idiot car en fait je n'aurais rien à lui dire, à part "j'adore vos livres, sauf In the Heart of the Country", "votre enfance en Afrique du Sud, ça n'avait pas l'air très marrant" et "votre nom se prononce bien Coutte-zée ?" Malgré tout, j'aime à rêver que ce serait chouette d'aller boire un thé avec lui et de parler, peut-être, de Don Quichotte, de the pooness of poo et de bouquins. Si tout se passait bien, je pourrais même l'inviter à dîner et concocter un menu végétalien, bien sûr il y aurait aussi mon cher Paul et en partant je leur donnerais à chacun un pot de kasundi* de tomates. Le grand homme me tapoterait l'épaule benoîtement et repartirais, l'œil critique. Je serais enchantée. Il serait comme une sorte de père spirituel que j'admirerais infiniment.
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*le kasundi est un condiment épicé à base de tomates et de piments frais, d'origine bengalie. Tout est meilleur avec et je pourrais même, si ça vous intéresse, vous en donner la recette, ce qui serait une première ici.
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{Coetzee, JM, The Childhood of Jesus, Melbourne, The Text Publishing Company, 2013}
{Tabucchi, Antonio, Sostiene Pereira, Feltrinelli, 1994 -- Pereira prétend, traduit de l'italien par Bernard Comment, 1994}
3 commentaires:
Sostiene Pereira est le premier bouquin que j'ai acheté au Mexique; je l'ai acheté à cause de Tabucchi que j'ai découvert en Inde avec Nocturne Indien et puis la sonorité du titre qui est comme une mélodie apaisante. J'aime les atmosphères qu'il dessine par petites touches. J'ai adoré Pereira! Oui j'étais déçue qu'un hommage un peu plus approprié ne lui soit pas rendu... Coetzee, rien lu... oui pour la recette du kasundi; il faudra que tu mettes une photo des piments!
Coetzee c'est assez fabuleux, je crois que c'est peut-être mon écrivain vivant préféré. Je vais réfléchir pour le kasundi.
Si vous prenez le thé avec Coetzee (!) demandez-lui de parler de sa trilogie Boyhood-Youth-Summertime : quelle est la part d'autobiographie ? J'ai du mal à croire qu'on puisse avoir aussi peu d'estime de soi !
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